L’écrit occupe une place de choix dans l’histoire de la langue et de la culture occitanes depuis la rédaction de chartes autour de l’an mil et l’émergence de la poésie des troubadours…
Petit abrégé de la littérature occitane
Le roman en prose Filomèna date des environs de l’an 1200 et a été traduit en occitan à partir d’un texte latin qui lui même aurait été écrit à l’abbaye de Lagrasse : « Il s’agit d’une suite de récits miraculeux et de tableaux guerriers où l’on voit Charlemagne fonder l’abbaye de Lagrasse et y mettre son quartier général d’où, avec l’aide de ses 12 pairs et héros de la geste narbonnaise, il repousse les Infidèles au-delà des Pyrénées ».
Pour certains, le troubadour Arnaut de Carcassés ne serait pas né du côté de Carcassonne, comme le laisserait entendre son patronyme mais à Carcassés, un écart de Laroque-de-Fa. Il est l’auteur d’un authentique petit chef-d’œuvre de la littérature romanesque : La nòva del papagai.
Le 19ème siècle marquera le grand renouveau des lettres d’Òc après la création du Félibrige en 1854, une association qui œuvre à la sauvegarde et à la promotion de la langue, de la culture de l’identité des pays de langue d’oc.
Aquiles Mir (1822 – Carcassonne 1901)
Il s’illustre par ses poésies comme Lo cant de la Lauseta et ses récits burlesques tels que Lo Curat de Cucunhan ou Lo lutrin de Ladèrn.
Escalas, mon país, ambe sa vièlha torre
Que menaça lo cèl de son grisastre morre,
Escalas, dont la font als environs fa enveja :
L’aiga fuma l’ivèrn e l’estiu sanglaceja !
Traduction : Escales, mon vieux pays, avec sa vieille tour / Qui menace le ciel de son museau gris / Escales dont la fontaine aux environs fait des envieux / L’eau fume l’hiver et l’été rafraîchit
Aquiles Mir
Joseph Anglade (Josèp Anglada / 1868 – 1930)
Il est toujours un nom marquant pour ses travaux sur l’ancien occitan (auteur entre autres d’une Grammaire de l’ancienne Langue d’Oc. Phonétique & morphologie) qui font toujours référence. Il doublait ce côté savant avec des écrits comiques écrits sous divers surnoms.
Paul Albarèl (Saint-André-de-Roquelongue 1873 – Montpellier 1929)
Médecin, il fonda la Cigala narbonesa. Majoral du Félibrige en 1918. Écrivain abondant et populaire auteur de théâtre, il marqua de sa forte personnalité la vie culturelle narbonnaise. Sa pièce la plus connue a pour titre : Viva lo vin !
Il utilisa plusieurs pseudonymes pour signer ses publications : Joan de la Ròca, Balin Balan, Joan de la Pineda, Ravaillant, lo Bascalaire, lo Piuletaire et bien d’autres.
Ernest Vieu (Roubia 1894 – Argeliers 1971)
Animateur de la troupe théâtrale Los Cigalons Narboneses, il était tout à la fois directeur, metteur en scène, auteur, décorateur et régisseur. Il écrivit de nombreuses pièces en un acte et mit en chantier une histoire du théâtre occitan : Teatre d’Òc, autors, òbras (IEO, 1973).
Leon Còrdas (Siran 1913 – Montpellier 1987)
Il est le grand écrivain du Minervois du 20ème siècle. Il est l’auteur de la pièce Menèrba 1210 qui retrace le drame de la Croisade contre les Albigeois. Romancier, il signe avec Sèt pans le livre de la mutation de l’agriculture due à la mécanisation. Ses poèmes sont d’une grande force évocatrice.
Mans de Breish (Carcassonne 1949)
Il participe au lancement de la chanson moderne occitane, interprète ses textes et les poètes occitans (Joan Bodon, Ives Roqueta). Il se fait poète avec son recueil Cantarèla.
Charles Cros (Fabrezan 1842 ; Paris 1888)
Il est à la fois inventeur (précurseur du phonographe) et poète (Sioplèt, prononcez bien le « s » final de Cros !).
Il était un grand mur blanc – nu, nu, nu,
Contre le mur une échelle – haute, haute, haute,
Et, par terre, un hareng saur – sec, sec, sec. Il vient, tenant dans ses mains – sales, sales, sales,
Un marteau lourd, un grand clou – pointu, pointu, pointu,
Un peloton de ficelle – gros, gros, gros. Alors il monte à l’échelle – haute, haute, haute,
Et plante le clou pointu – toc, toc, toc,
Tout en haut du grand mur blanc – nu, nu, nu. Il laisse aller le marteau – qui tombe, qui tombe, qui tombe,
Attache au clou la ficelle – longue, longue, longue, Et, au bout, le hareng saur – sec, sec, sec. Il redescend de l’échelle – haute, haute, haute,
L’emporte avec le marteau – lourd, lourd, lourd,
Et puis, il s’en va ailleurs – loin, loin, loin. Et, depuis, le hareng saur – sec, sec, sec,
Au bout de cette ficelle – longue, longue, longue,
Très lentement se balance – toujours, toujours, toujours. J’ai composé cette histoire – simple, simple, simple,
Pour mettre en fureur les gens – graves, graves, graves,
Et amuser les enfants – petits, petits, petits.
Charles Cros, Le hareng-saur.
Henry Bataille (Nîmes 1872 – Rueil-Malmaison, 1922)
Poète et dramaturge, Henri Bataille repose au cimetière de Moux, dans un tombeau en forme de fontaine Renaissance : » Oui, j’ai vécu longtemps dans l’idée de ma mort. J’ai considéré ce monde qui m’entoure comme un feu brillant qui va s’éteindre. Cette certitude n’est point disparue avec la certitude revenue de vivre encore. Je sais que tout ceci doit périr, qui m’entoure. Le mal n’est pas dans moi, mais dans ce monde auquel j’appartiens, qui tourne et qui m’entraîne. Et c’est ce monde qui va disparaître. Et c’est ce drame que j’exprime, et c’est ce drame qui est mon théâtre et ma vie ».
Jean Lebrau (Moux 1891 – 1983)
Ce poète et écrivain, a été initié à la poésie par Henry Bataille. Plusieurs titres de ses œuvres notent l’attachement au pays et sa volonté de le dire :
En poésie : Le cyprés et la cabane (1922) ; Le ciel et la garrigue (1929) ; Couleur de vigne et d’olivier (1929) ; Quand la grappe mûrit (1932) ; Le Feu des sarments (1958) ; Corbières (1959) ; Du cyprès tourne l’ombre (1966).
En prose : Images de Moux (1926) ; Images de l’Aude (1934) ; Ceux du Languedoc (1946) ; Ce pays où l’ombre est un besoin (1950).
C’est donc fort logiquement que Moux organise des Nuits de la poésie chaque été à la fin du mois de juillet.
René Depestre (Jacmel 1926)
Ecrivain haïtien, il a été incarcéré dans son pays pour raison politique, il choisit l’exil. C’est à Lézignan-Corbières qu’il poursuit depuis une trentaine d’années ses activités littéraires, couronnées par le Prix Renaudot en 1988 pour le roman Hadriana dans tous mes rêves.